Car Life
Toutes les Ferrari de l’histoire [années 50]

Longtemps, une Ferrari pouvait se résumer à un moteur qui chante comme une diva, installé dans une sublime carrosserie. Des autos délicieusement imparfaites, ce qui est normal puisqu’il ne s’agissait que de voitures de course contrariées.

166 Inter

1948-1951 – 38 exemplaires produits – V12, 115 ch – 180 km/h – Cote 2015 : 750 000 €

Avant elle, il y avait eu la Ferrari 125 S, en 1947, victorieuse en course, mais évidemment, la toute première routière revêt une importance symbolique. Passé le moment d’émotion, il faut bien admettre que la ligne de la 166 Inter ne restera pas dans l’histoire. D’ailleurs, elle ne ressemble à aucune autre Ferrari produite dans le futur, mais déjà, les gènes techniques de la marque sont bien là puisque son petit moteur deux litres… est un V12 ! A noter qu’elle a existé sous différentes carrosseries, signées par Touring (photo), puis Giovanni « Pinin » Farina (frère de Battista), Vignale, Bertone et Ghia. Ce sera le cas de toutes les Ferrari jusqu’au milieu des années cinquante, chaque client faisant réaliser sa propre carrosserie plus ou moins fidèle au modèle d’origine. Ainsi, les 300 premières productions Ferrari de l’histoire sont pratiquement toutes différentes les unes des autres, y compris parfois au niveau motorisation. De quoi donner du travail aux historiens jusqu’à la nuit des temps.

195 Inter

1951-195226 exemplaires produits – V12, 135 ch – 185 km/h – Cote 2015 : 800 000 €

Les progrès de la 195 par rapport à la 166 touchent plus l’esthétique que le moteur. Celui-ci gagne en cylindrée, en passant à 2 341 cm3, et en puissance : 135 ch ! De quoi permettre à la voiture de prendre « 200 compteur » comme on disait à l’époque. Surtout, en ce temps-là, les autos étaient extrêmement légères et, avec seulement 950 kg sur la bascule, la deuxième Ferrari de l’histoire accélérait bien plus fort que la plupart de ses concurrentes. La ligne préfigure déjà celle des modèles stars à venir, bien que Pininfarina n’ait pas été concerné sur cette carrosserie.

212 Inter

1951-195380 exemplaires produits – V12, 170 ch – 200 km/h – Cote 2015 : 800 000 €

La 212 Inter est une auto historique, non pas pour ses caractéristiques, somme toute assez comparables à celles de ses deux devancières, mais parce qu’elle marque le début de la collaboration durable entre Ferrari et Pinin Farina (en deux mots à l’époque). Désireux de confier le dessin de ses routières à un seul prestataire pour des raisons de commodité, Enzo décide de façon assez surprenante d’abandonner Vignale, Ghia (auteurs des premières 212 d’ailleurs) ou Touring. Chargé d’habiller les dernières 212 sorties de l’atelier de Maranello, dont un splendide cabriolet, Pininfarina propose des lignes plus raffinées, plus tendues. Pas encore des chefs d’œuvre, mais Enzo a trouvé son artiste : la légende balbutie.

340 et 342 America

1951-195328 exemplaires – V12, 230 ch – 240 km/h – Cote 2015 : 1 100 000 €

Côté moteur, les choses sérieuses commencent enfin. Si les Ferrari ont toujours été animées par des V12, leur cylindrée était ridicule, notamment face aux grosses américaines. Et Enzo rêve d’explorer le nouveau continent, où la marque commence à être connue grâce à son succès aux 24 H du Mans. L’ingegnere confie donc à Lampredi le soin de développer un nouveau moteur sur la base du V12 Colombo vu dans la 166 Inter trois ans auparavant, pour le porter à 4,1 litres, soit plus du double de sa cylindrée de départ ! Commercialement, la 340 (puis 342) restera un échec avec moins de 30 exemplaires produits en trois ans.

375 America

1953-1954 – 12 exemplaires – V12, 300 ch – 250 km/h – Cote 2015 : 4 000 000 €

A cette époque les Ferrari de route ne sont pas seulement inspirées des modèles de compétition : ce sont les modèles de compétition, à peine plus civilisés que ceux engagés en course. Là encore, il ne s’agit pas d’un choix ou d’une quelconque stratégie destinés à créer la légende autour de la marque : Ferrari n’avait tout simplement pas les moyens de procéder autrement et de concevoir de but en blanc une routière. Ainsi, cette 375 héritait-elle du moteur des Formule 1 de grands prix ! Tout simplement. Son nom continue d’appeler l’Amérique, mais sans le moindre écho pour le moment : 12 exemplaires produits.

375 MM

1953-1955 – 21 exemplaires – V12, 340 ch – 270 km/h – Cote 2015 : 10 000 000 €

MM comme Milles Miglia, la célèbre course que Ferrari gagna si souvent. L’appellation (tout comme la ligne !) ne laisse planer aucun doute : la 375 MM est bien une auto de course, tout juste homologuée pour se déplacer sur la route. Pas de pare-brise, mais un simple saute-vent, pas de capote, pas de pare-chocs… La MM est une brute, dont la rareté et la beauté bestiale lui permettent de coter plusieurs millions d’euros aujourd’hui.

250 GT Europa

1954-1956 – 36 exemplaires – V12, 240 ch – 220 km/h – Cote 2015 : 700 000 €

Et voici utilisée pour la première fois la numérotation 250. Le chiffre magique, correspondant à la cylindrée unitaire du V12 : 250 cm3 x 12 = 3 000 cm3. Oui, un trois litres, c’est-à-dire le retour du moteur Colombo, supplanté ces dernières années par le gros V12 Lampredi, pour des raisons de coûts, de fiabilité (ce trois litres était indestructible) et surtout d’encombrement. Côté style, Pininfarina commence à s’affirmer et c’est bien la lignée des 250 qui va consacrer son œuvre, avec comme sommet les 250 GTO et Lusso quelques années plus tard. Côté succès commercial, ce n’est pas encore ça…

410 Superamerica

1956-1959- 34 exemplaires – V12, 400 ch – 280 km/h – Cote 2015 : 2 400 000 €

Nous sommes au milieu des années 50 et une folie des grandeurs parfaitement justifiée commence à gagner Ferrari. La marque s’est imposée dans le monde entier et dans toutes les disciplines, y compris en Formule 1 (déjà deux titres) face aux plus grands. La 410 doit s’imposer comme la supercar de l’époque : énorme moteur 5 litres développant 400 chevaux dans ses dernières évolutions, 4,70 m de long et une vitesse de pointe (invérifiable !) de 280 km/h ! La ligne, nerveuse, racée et élégante, se distingue des 250 par mille détails qui font pleurer de bonheur les esthètes depuis près de soixante ans.

250 GT « Boano-Ellena»

1956-1958 – 137 exemplaires – V12, 240 ch – 250 km/h – Cote 2015 : 520 000 €

Dire qu’avec cette deuxième lignée de 250, Ferrari rentre dans l’ère industrielle serait exagéré. Mais avec 137 exemplaires produits, elle marque le début d’une logique irréversible à Maranello. En effet, à cette date, moins de 300 voitures de route avaient été commercialisées depuis les débuts la 166 Inter huit ans plus tôt et toujours au gré des opportunités, de modifications ou d’adaptation d’une auto de course. Là, Ferrari s’affirme comme un authentique constructeur d’automobiles « de tous les jours », ou presque. La « Boano-Ellena » doit son appellation (tout à fait officieuse) aux deux ingénieurs qui se sont succédé sur son berceau, ceci afin de la distinguer de l’ancienne 250 GT.

250 GT Cabriolet

1957-1967 – 240 exemplaires – V12, 240 ch – 250 km/h – Cote 2015 : 1 000 000 €

Là aussi, fini le bricolage. Jusqu’alors, les cabriolets étaient des commandes spéciales de clients. Cette fois, il s’agit bien d’un modèle à part entière, assez sublime d’aspect. Le succès sera immédiat et différentes versions virent le jour tout au long de la carrière de la voiture qui s’étirera dix ans durant. Témoin de la volonté de la marque de proposer des autos toujours plus civilisées, la possibilité de coiffer l’habitacle d’un hard top. Quand on songe que quatre ans avant, la MM n’était même pas dotée d’une capote…

250 GT Spyder California

1958-1962 – 104 exemplaires – V12, 240 ch – 250 km/h – Cote 2015 : 9 000 000 €

Stop, chef d’œuvre. Première véritable icône de la marque, elle continuera à faire rêver bien après l’arrêt de sa production. Belmondo, Delon, Vadim, Deneuve… tant de stars défileront derrière son volant. Il est vrai que la California réunit déjà tout ce qui rend une Ferrari si désirable : sa ligne, chef d’œuvre intemporel (on l’admirera encore dans cent ans), son châssis, directement dérivé de la 250 de compétition, son moteur, coiffé de la fameuse culasse Testa Rossa, et même son appellation, évocatrice du rêve américain, si lointain à l’époque… Sa côte est devenue inaccessible.

250 GT Coupé

1958-1960 – 335 exemplaires – V12, 240 ch – 250 km/h – Cote 2015 : 320 000 €

Très belle voiture que cette 250 GT Coupé, mais peu innovante, ni sur le style, encore moins sur la technique. Tandis que la concurrence commence à poindre (Aston Martin, Maserati…), Ferrari se contente toujours de freins à tambours, d’un essieu rigide à l’arrière et de ressorts à lames pour toute sa gamme. Les dernières versions hériteront enfin de freins à disques, mais on commence à comprendre que Ferrari est une marque extrêmement conservatrice et le paiera souvent cher en course. Cela n’empêchera pas la 250 GT de s’écouler à 335 exemplaires, nouveau record. Ferrari devient un constructeur riche, mais qui dépense tout son budget -et même un peu plus !- dans la course automobile.

250 GT Berlinetta Lusso

1959-1962 – 165 exemplaires – V12, 280 ch – 270 km/h – Cote 2015 : 4 800 000 €

Contrairement à ce que son appellation indique, la Lusso (luxe en italien) n’est qu’une voiture de course vaguement adaptée à un usage routier. On reconnait là le sens du marketing d’Enzo. Plutôt que de construire entièrement un nouveau modèle, il se contenta d’apposer l’appellation Lusso et de doter la 250 de deux sièges en cuir pour faire croire à un coupé bourgeois. Les clients mal informés ont dû être un peu surpris. Cette GT a la rage au corps et n’est à l’aise qu’en conduite sportive. Et c’est précisément ce qui fait son succès, aujourd’hui encore : près de 5 millions d’euros tout de même.



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