Thierry Soave
Supercars : ridicules face aux autos de course

Les puissances toujours plus extrêmes des Supercars laissent penser qu’elles surclassent des autos de course sur circuit. En réalité, le verdict du chrono face à d’authentique machines de compétition les rend assez ridicules dès le premier virage venu.

Records du tour à Spa-Francorchamps

  • Formule 1 – Mercedes : 1mn47s
  • LMP1 – Porsche 919 : 1mn54
  • GT3 – Ferrari 458 GT3: 2mn16
  • Cup – Porsche 911 Carrera Cup : 2mn23
  • WTCC – Citroën C4 Elysée : 2mn23
  • Supercar – Porsche 918 Spyder : 2mn31

Les chronos que nous publions sont réalisés par des pilotes professionnels et arrondis à la seconde, les différences de température de l’air ou tout simplement de pilotage pouvant jouer légèrement dans un sens ou dans l’autre. Il s’agit de temps réalisés sur la piste de Spa-Francorchamps, ou extrapolés avec fiabilité. Nous ne disposons pas de données de celle qui constitue très certainement la plus performante des supercars, la Ferrari LaFerrari, mais il techniquement juste de la considérer comme 3 à 4 secondes plus rapides que la Porsche 918. Ce qui laisse encore une belle marge aux race cars. En revanche, il est clair qu’une 918 spécialement préparée pour la piste (allègement de 450 kg, pneus slicks, freins et suspensions racing, rapports de boîte courts, etc.) roulerait sans aucun doute en 2mn15s.

Tandis que les amateurs de Supercars emploient systématiquement les superlatifs les plus évocateurs, voici le moment de la douche froide. Juge de paix absolu de la performance automobile, le temps sur un tour de circuit dévoile la différence colossale existant entre une Supercar, la plus aboutie qui soit, et une machine de compétition, dans sa brutale simplicité. Mais attention, nous ne parlons même pas de Formule 1 : une simple Ferrari 458 GT3 de 550 chevaux roule 15 secondes plus vite à Spa et même une Porsche Cup de 460 chevaux, colle encore des secondes par gros paquets à l’une des Supercars les performantes du moment, la Porsche 918 Spyder.

Pourtant, à la lecture de la fiche technique, rien ne laisse supposer un tel écart : 887 chevaux pour la routière, 460 chevaux pour la Cup, 1 675 kg d’une côté, 1 175 kg de l’autre, soit un rapport poids/puissance toujours largement à l’avantage de la 918 : 1,88 kg/ch contre 2,55 kg/ch. Dès lors, comment expliquer que la Carrera Cup, sur un circuit comme Spa-Francorchamps, faisant la part belle aux lignes droites et aux virages rapides, explose à ce point les chronos ? La réponse est extrêmement simple : l’une est une voiture de course, l’autre non. Sachant qu’en accélération en ligne droite, la 918 surclasse sa rivale, c’est donc en virage et dans les zones de freinage que la voiture de course établit une énorme différence. Plus concrètement, les pneus slicks montés sur la Cup apportent la moitié de la différence de temps. Puis, dans le détail, tout dans la Cup a été conçu dans un seul et même objectif, la performance chronométrique, sans la moindre contrainte dictée par le confort, l’agrément de conduite, la consommation, le niveau sonore, la conduite en ville ou tout simplement, l’homologation. Et surtout, la voiture de route doit être facile à conduire. D’ailleurs, un non-pilote tournera moins vite avec la Cup qu’avec la 918. Une voiture de route, même la plus exclusive, doit pouvoir rouler des milliers de kilomètres sans que l’on ait à inspecter son moteur. Elle doit également démarrer et rouler par tous les temps, de 50° à -40°. Ses freins doivent répondre à la première sollicitation à froid et ses pneus pouvoir rouler sur le sec comme sur chaussée mouillée. Et bien d’autres compromis encore, telles que la visibilité ou la sécurité des passagers. Rien de tout cela avec l’auto de compétition : poids réduit, direction directe, hauteur de caisse limitée, rapport de boîte ultra-courts, suspensions sans débattement et fixées sans filtre à la coque, aérodynamique poussée à l’extrême, freinage dépourvu d’ABS, aucune aide à la conduite, position de conduite fixe, arceau de sécurité pour rigidifier la caisse, etc., etc. Il n’y a vraiment pas match entre les deux. Et s’il fallait s’en convaincre un peu plus, il existe une comparaison encore plus humiliante pour les Supercars, puisqu’une WTCC traction avant, type Citroën C4 Elysée de moins de 400 chevaux tourne, dans les mêmes temps qu’une Porsche Cup… soit 8 secondes plus vite que la Porsche 918. Alors, que ceux qui répètent à l’envi qu’une GT de route de 900 ou même 1 000 ch marche comme une Formule 1, consultent notre petit tableau : Lewis Hamilton a roulé à Spa cette année avec sa Mercedes F1 en 1mn47s, ce qui veut dire qu’il aurait pris un tour à la 918… dans son 3ème tour ! Fin de l’histoire.



>