Les éditos de Paul Belmondo [Supercars – Bianchi – Rossi]

A Spa, une Citroën C4 WTCC de 380 ch colle 8 secondes au tour à une Porsche 918 Spyder de près de 900 ch !

Profitons de la parution de ce grand dossier consacré aux Supercars pour tordre le cou à une légende bien établie, voulant que les voitures de route ultra-puissantes surpassent les autos de course. La blague. En plus de vingt ans de compétition, j’ai eu la chance de conduire à peu près tout ce qui roule sur piste, terre ou glace : onze participations aux 24 Heures du Mans, dix au Dakar, des dizaines de course de GT et des milliers de kilomètres en monoplace, de la Formule Renault à la Formule 1, en passant par toutes les formules intermédiaires. Parallèlement, j’ai pu tester en conditions extrêmes toutes sortes de GT de route à l’occasion de mes premières collaborations à Auto Plus ou Paris Match dès les années 80, et maintenant à Car Life. Alors, quand j’entends dire que, la dernière Ferrari, la future Bugatti, la plus puissante des Lamborghini, ou pire, le nouveau délire de 1 500 ch d’un préparateur,  « sont de véritables Formule 1 », j’avoue que ça m’agace un peu. Ainsi, pour bien comprendre la différence entre une auto de course, même la plus modeste qui soit, et la Supercar, y compris la plus puissante, il suffit de les confronter sur un juge de paix comme le circuit de Spa-Francorchamps et de mesurer le résultat chronométrique. La surprise peut paraître énorme pour certains, mais la différence entre les deux types de voitures tourne au ridicule complet. Vous trouverez le détail des chronos page 83 de ce numéro, mais sachez juste que si la Porsche 918 Spyder avait participé au dernier Grand Prix de Belgique, Hamilton lui aurait pris un tour… dès son troisième tour de course, dans la mesure où la F1 tourne 43 secondes plus vite. Encore plus parlant, la Citroën C4 Elysée engagée en WTTC de 380 ch (la Porsche en développe près de 900 !) lui colle encore huit secondes à chaque passage. Tout cela reste en réalité très logique. De la même façon qu’il ne viendrait à l’idée de personne d’engager une Formule 1 sur le Dakar ou le Trophée Andros, les Supercars doivent être considérées pour ce qu’elles sont : de formidables triathlètes, dotées de qualité leur permettant d’évoluer avec aisance sur route, sur piste ou même en ville pour certaines, mais toujours dans une nécessité de compromis et de polyvalence, étrangère aux voitures de compétition, bien incapables de réaliser autre chose qu’un tour chrono. Chacun à sa place donc.

Il restait peu d’espoir de voir Jules Bianchi revenir à nous. Avec l’annonce de sa mort, à la fin de l’été, se clôt définitivement un dossier sur la sécurité en grands prix qui aura été mené avec une belle habileté pour éviter de désigner les responsables de ce drame. La mascarade de commission d’enquête aura conclu à la responsabilité de celui qui n’est plus là, ce qui arrange tout le monde. La réalité est que Jules, n’aurait jamais dû avoir à croiser une grue en plein grand prix de Formule 1, ou alors sous régime de safety-car, donc une épreuve neutralisée, et non pas avec un chrono qui continu à tourner pour l’ensemble des concurrents. De tous temps, la règle du drapeau jaune (danger, ralentissement, interdiction de dépasser) a prêté à controverse. Pour l’appliquer, les commissaires vérifient que le pilote est passé dans la zone de danger moins vite qu’au tour précédent. Ce qui ne veut rien dire dans le cas d’une piste humide et changeante comme c’était le cas à Suzuka. La solution existe, elle est appliquée aux 24 Heures du Mans. C’est le virtual safety-car, un bouton actionné par le pilote sur ordre de la direction de course, qui limite la vitesse de sa voiture dans la zone de danger, exactement comme dans les stands. Une solution toute simple, appliquée depuis cette saison aussi en F1. Un an trop tard.

Toujours en grands prix, mais moto cette fois, je voudrais relever l’incroyable come-back de Valentino Rossi cette saison. Quelle que soit l’issue du championnat -il terminera premier ou deuxième-, sa performance sera à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire du sport. La moto est un discipline extrêmement physique, bien plus que l’automobile et ce qu’il réalise à 36 ans, face aux jeunes prodiges Marquez ou Lorenzo est tout simplement exceptionnel. Un peu comme si Schumacher était revenu en F1 à l’âge de cinquante ans et avait disputé le titre à Hamilton. Personne ne lui accordait la moindre chance il y a déjà cinq ans et tout le monde souhaite maintenant qu’il soit champion du monde ! Forza Valentino.



>